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[ANONYME, Femme proche du cercle de Barthélémy Prosper Enfantin, Saint-Simon]

A LA JEUNESSE ... CONSCIENCE ... DE LA VOLUPTÉ ... PLAN D'ORGANISATION ... NOTES ... RÉSUMÉ DE MES IDÉES.

Sans lieu ni date [vers 1840 ?]

1 brochure in-4 (25 x 19 cm), broché, de (1)-46 pages autographiées. Couverture muette de papier noir de l'époque. Usures et salissures aux premiers et derniers feuillets, le texte reste toujours lisible. Corrections manuscrites et étiquettes de correction contrecollées dans le texte. Complet.

MANUSCRIT AUTOGRAPHE DE L'AUTEUR REPRODUIT A L'ÉPOQUE PAR L'AUTOGRAPHIE.

En haut du premier feuillet, en gros caractères calligraphiés, et en guise de titre, on lit : "A la jeunesse." Suit un texte de présentation d'une page (32 lignes). Le texte se poursuit au recto du feuillet suivant, paginé 1. A la page 6 commence "1er Lemme. Conscience." A la page 11 commence "Note 1ere". A la page 17 commece "2eme Lemme. De la volupté." A la page 37 "Plan d'organisation." A la page 43 "Notes faisant suite au Plan d'organisation." Enfin, à la page 46 et dernière (verso du dernier feuillet), on lit : "Résumé de mes idées."

Ce manuscrit autographié n'est pas signé. L'auteur qui reste non identifié est une femme proche du cercle de Barthélémy Prosper Enfantin et de Saint-Simon. En voici quelques extraits significatifs :

"Travailler en commun, jouir en commun est une idée extravagante pour ceux qui n'éprouvent de bonheur que dans la privation d'autrui & n'aiment que les jouissances exclusives [...] C'est donc à ceux dont le jugement et la conscience n'ont point encore été faussés. C'est à la jeunesse si vive si ardente & en même temps si sociable que je recommande la méditation de mes principes [...] (extrait de la page de présentation A la jeunesse).

Le texte principal débute ainsi : "Si par gouverner les hommes, on entendait, assurer à chacun une existence en rapport avec son industrie et ses talents, certes quoique dépouillées les masses auraient moins à se plaindre mais si je ne puis me procurer l'existence qu'à la condition du travail, n'ai-je pas droit d'exiger du travail pour obtenir cette existence ? En est-il ainsi cependant ? [...] Interrogez votre conscience ou plutôt répondez à ces enfants dont les cris faméliques déchirent les entrailles de ceux qui leur donne le jour et leur font sans cesse maudire la fécondité désastreuse dont la nature les a doués. Telle est cependant la condition de 99/100 d'une population prétendue libre et éclairée dont l'existence toute précaire se trouve à la merci d'une poignée d'individus. [...]" et plus loin : "Une société célèbre (les St Simoniens sont cités en note de bas de page) a déjà émise des principes analogues à ceux que je professe moi-même depuis longtemps, le rapprochement néanmoins m'a fait sentir la différence et ne pouvant m'unir à elle, je donne enfin isolément au public, un plan et des idées depuis longtemps consignées sur le papier et que différentes circonstances et une apathie naturelle m'avaient empêché de mettre au jour. C'est tel qu'il est écrit longtemps avant la révolution de juillet que je le livre au public. [...]".

L'auteure soutenait les idées des Saint Simoniens puis s'en est écarté pour finalement proposer par elle-même un système et des idées que l'on retrouve exposées ici pour la première fois, peu de temps sans doute après la révolution de juillet (1830). Cet imprimé peut donc dater des années 1831 à 1840. La révolution de juillet étant évoquée comme un événement assez proche.

"Je ne me fais pas d'illusion sur les haines, le mépris, les sentiments de toutes sortes et peu favorables qu'il est susceptible d'exciter, mais mon obscurité me met à l'abri des unes et me fait rire des autres. Du reste, j'oublierai toutes les contradictions si ces principes en germant dans quelques âmes pures et ardentes se développent et portent des fruits qui soient utiles au genre humain. [...] Il faut aux hommes un nouveau code, un nouvel évangile, une nouvelle ère. [...]. Applaudissez à vos maîtres et entonnez avec eux les hymnes d'allégresse et les cantiques d'actions de grâce : ils ont semé le crime. Vos consciences l'ont recueilli, et ses fruits exécrables vous servent d'aliments que, comme des reptiles odieux vous consumez en paix dans l'ombre. [...]. J'ai été longtemps employé dans de grandes pensions. J'ai toujours gémi du libertinage prématuré que j'y ai vu et qui altérant la santé de tous en faisait périr plusieurs." (page 19).

Elle conclut dans une note : "La volupté ne peut-être un crime devant les hommes et suivant la morale qu'en ce qu'elle trouble l'ordre social, mais cet ordre changé, s'il n'y a plus de trouble, il n'y a plus dans le même fait ni crime ni scandale. [...] Je suis libre - Oui sans doute, grâce à vos inventions, de voir périr de misère, sans pouvoir y apporter remède, tout ce que j'ai de plus cher au monde. [...]".  

Vient enfin le "Plan d'organisation". Quels en sont les grandes lignes ?

"Nous sommes tous frères et sœurs, époux et épouses, tous nobles et égaux, tous travailleurs dès que nous avons quitté les écoles [...]" "se former, se développer et s'instruire" Les mœurs seront simples, douces, polies, pleine d'onction et de charité, l'égalité parfaite" "aucun travail pénible ou sale ne doit flétrir ou profane". "Les hommes se répandent en commun dans les champs, dans le ateliers pour accomplir les travaux que le Conseil a réglés et dont les ordres sont transmis par la dame chef de chaque grande communauté." "Toute la société se divise en communautés, un certain nombre de communautés forment canton ou province qui toutes ressortissent d'un seul chef, toujours une femme."

"Tant que les communautés seront dans l'Etat et non pas l'Etat, elles se soumettront à ses lois, ses impôts, ses enregistrements et même à ses conscriptions, et fourniront leur contingent, les entretiendront à l'armée [...]." L'auteur ne prône pas une révolution sanglante et la dénonce même. Il vise à l'amélioration du genre humain. L'auteur conclut par un résumé de ses idées et le commence par ces mots : "Jésus disait aux hommes de son temps : qu'il les avait convaincu de mensonge, d'avarice, de fornication et d'hypocrisie." A plusieurs reprises dans son texte, l'auteur fait référence à la religion chrétienne, sans pourtant la défendre, souvent pour la condamner, et aussi pour en prendre à son compte quelques règles morales. "La révolution n'a point encore été complète ; d'esclave qu'elles étaient, les masses sont devenues prolétaires, c'est à dire sans pain, sans asile, et les mœurs n'ont qu'empiré."

Le texte s'achève par une phrase complète et il semble que ce manuscrit autographié soit complet. Un renvoi vers une note semblerait pourtant indiqué le contraire. Ce document est important pour l'histoire des idées au XIXe siècle, notamment en ce qui concerne les idées féministes.
 

Ce manuscrit n'a, semble-t-il, jamais été publié. Sans doute a-t-il servi de support à un discours ou une conférence. Sans doute s'agit-il de la seule copie ayant subsisté. Il mérite les honneurs d'une édition moderne scientifique.

DOCUMENT ÉPHÉMÈRE RARISSIME.

Manuscrit inédit (vers 1840) "Plan d'organisation" pour une société nouvelle

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