Dr. Eugène DUEHREN (pseudonyme de Iwan BLOCH) / Octave UZANNE, Préface
LE MARQUIS DE SADE ET SON TEMPS. Etudes relatives à l'histoire de la civilisation et des moeurs du XVIIIe siècle. Traduit de l'Allemand par le Dr. A. Weber-Riga. Avec une Préface : L'Idée de Sadisme et l'Erotologie Scientifique, par Octave Uzanne.
Berlin, H. Barsdorf, et Paris, A. Michalon, 1901
1 volume in-8 (22 x 15 cm) de XXVIII-501-(3) pages.
Cartonnage bradel demi-toile crème de châtaigne de l'époque, pièce de titre de maroquin marron, fleuron doré, date dorée en queue du dos, couvertures en parchemin végétal conservées en très bon état, relié sur brochure, non rogné. Reliure signée LEMARDELEY. Bel exemplaire, très frais.
EDITION ORIGINALE FRANÇAISE.
Ouvrage publié pour la première fois en 1900 sous le titre : Der Marquis de Sade und seine Zeit.
Exemplaire du tirage ordinaire. Il a été tiré 100 exemplaires au format grand in-4.
Provenance : Ex libris Robert Nossam (nom gravé sur bois dans un cartouche).
« On a prétendu que les livres d'imagination se trouvaient être plus particulièrement dangereux en France que partout ailleurs, par cette simple raison que les auteurs y veulent tous avoir de l'esprit, et que les lecteurs même en prêtent à ceux qui ne se sont point avisé d'en montrer. Cette observation peut être vraie quelquefois, mais il serait sans doute plus judicieux encore d'affirmer que le principal danger des livres français, - (surtout des romans et des autres oeuvres de fiction,) - réside dans ce fait que ceux qui s'adonnent à les écrire y déploient habituellement une extraordinaire et volontaire débauche d'images érotiques et s'efforcent, au cours de leurs récits, de dépasser leurs concurrents par une surabondante mise en scène de vices, de peintures licencieuses et d'excentricités passionnelles. » (Extrait de la Préface d'Octave Uzanne)
Uzanne explique l'arrivée des écrits de Sade dans ce contexte : « Ce fut alors une course à l'extravagance, à l'immoralité, au dévergondage ; on apporta un véritable esprit de fanfaronnade à se montrer impudique et luxurieux, à passer du style équivoque à la brutalité et à la scatologie. Il y eut une littérature toute préoccupée d'érotisme, toute dévouée à l'étude de ces contacts d'épidermes qui constituent l'amour, au dire de certains désabusés. Comme le cercle des caresses humaines est des plus restreint et que l'on a vite fait d'épuiser les diverses combinaisons d'accouplements d'un même acte, voire en dehors des lois normales et de la casuistique, il fallut bien arriver à violenter la nature, à créer un satyriasisme inhumain, à exposer des théories de rapprochements criminels, à prêcher la volupté dans le crime, la jouissance dans la douleur d'autrui, en un mot à imaginer une érotomanie furieuse et folle, se satisfaisant de préférence dans une débauche sanglante torturante et ordurière. Le Marquis de Sade fut l'homme indiqué pour synthétiser et pousser jusques à ses dernières limites l'art de la spermacrasie anormale et monstrueuse. Il dépassa dans ce genre toute l'antiquité ; il fixa dans un monde d'horreurs les colonnes d'Hercule des démentes priapées. Jamais, heureusement, on n'ira désormais aussi loin ; de Sade aura borné l'horizon du champ érotique. Ses ouvrages sont des Bibles du Diable qui consacrent ces principes effroyables qui guidèrent les actes des Néron et des Gilles de Retz (sic). Il eut toutefois le génie du mal avec une candeur infinie et crut toujours se justifier par son surprenant distique : On n'est pas criminel pour faire la peinture / Des bizarres penchants qu'inspire la nature. / Cette littérature graveleuse, frivole, impudique du dix-huitième siècle qui aboutit aux livres révolutionnaires éroto-anarchistes du Marquis de Sade, cette littérature n'est pas plus l'image réelle de la société française d'alors que les peintures de Watteau, de Boucher ou de Fragonard ne sont ses miroirs, car elles n'expriment, ni la physionomie même des personnages du temps, ni l'aspect véritable des paysages de notre sol. Le siècle dernier avait la passion de se travestir en des mythologies nouvelles, de s'exprimer en symboles, de se farder, de se pomponner, de se poudrer à blanc, de s'affabuler en des styles de bergeries, de se métamorphoser en des attitudes d'objets de porcelaineries gracieuses et maniérées. [...] » (Extrait de la Préface d'Octave Uzanne)
Uzanne donne ensuite quelques détails sur l'idée de Sadisme qui devient à la mode dès le milieu du XIXe siècle passé, une sorte de curiosité morbide de salon, un attirance, une fascination pour l'inversion sexuelle, les aberrations génésiques, etc. Il évoque aussi comment la science s'en est préoccupé : « Elle a d'ailleurs pour les amours contre nature de si jolis mots : l'homosexualité, l'uranisme, l'inversion sexuelle, la nymphomanie, le saphisme et tant d'autres encore ! » Il pose un regard bienveillant sur l'intérêt scientifique suscité par ces étalages de « dépravations de l'instinct génésique. » Uzanne, homme de paradoxes, tout à la fois réprimandant ces Bibles du Diable et donnant de l'intérêt à leur étude et en désignant les « parties saines » de sa Philosophie dans le boudoir. Il poursuit : « Aujourd'hui, ce montre, dont le nom seul faisait rougir nos pères, est enfin admis dans le vaste musée de la science anthropologique ; on y étale son mal publiquement : on s'applique à étudier le type exceptionnellement anormal qu'il fut ; on recherche les causes de son délire : on classe son cas dans une catégorie de folie dont l'étude a dévoilé le curieux processus, aussi, n'effraie-t-il plus aucunement. Le Sadisme est un département de l'aliénation mentale, on en parle comme d'une irresponsabilité qui peut affliger l'individu, mais personne ne s'en effare. Avant cinquante années, il en sera de même de tant d'autres folies étrangement passionnelles qui sont aujourd'hui du seul ressort de la criminalité. - La vérité est en marche ; espérons-le du moins. »
Eugène Duehren est le pseudonyme d'Iwan Bloch. Iwan Bloch (1872-1922) est un dermatologue allemand. Né à Delmenhorst, en Allemagne, il est considéré comme le premier sexologue. Il retrouvera le manuscrit desCent Vingt Journées de Sodome du Marquis de Sade, qui était considéré comme perdu, et il le publiera en 1904 sous le pseudonyme de Eugène Dühren.
BEL EXEMPLAIRE DE CET IMPORTANT OUVRAGE SUR LE MARQUIS DE SADE.
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